Trouvons un autre nom au crowdtesting
Les noms qu’on donne aux choses n’ont rien d’anodin; ils modèlent notre façon de les appréhender et influencent nos actions. Il est donc intéressant, quand on se lance dans une activité, de s’interroger sur le nom même de cette activité.
Un terme à franciser ?
Il y a quelques mois, sur le blog Hightest, il était question de la désignation française de l’activité de crowdtesting.
Faudrait-il parler de test participatif, simple et clair, mais en deux mots ? De massifouinage, ludique mais peut-être un peu obscur ? D’immensitest ou de diversitest, pour mettre en avant les apports spécifiques de cette pratique ? Ou encore, la horde de crowdtesteurs pourrait-elle être appelée validescouade?
L’essentiel étant de se comprendre, et l’anglais étant globalement maîtrisé à un niveau au moins basique au sein des DSI, il n’est finalement peut-être pas urgent que ça d’avoir un terme francophone pour désigner cette pratique.
Pendant que les encyclopédies et la Délégation Générale à la langue française et aux langues de France se creusent la tête sur cette question (si seulement), nous vous proposons cependant aujourd’hui de constater un autre problème du terme «crowdtesting».
Un terme trop orienté ?
«Crowdtesting» signifie littéralement «test par la foule». Il adopte le point de vue du créateur d’application, qui recherche un maximum de retours d’utilisateurs, idéalement une «armée» de testeurs. Ce terme a tout pour le faire rêver ; on imagine tout de suite les cas de test en train de slammer sur une foule de testeurs du monde entier, et c’est en effet ce qui est proposé.
Alors où est le problème ?
Ce qui est dommage avec le mot «crowdtesting», c’est qu’il ne fait pas forcément rêver… les crowdtesteurs. Il n’est pas forcément valorisant de se dire qu’on n’est qu’un individu dans une foule, surtout lorsqu’il nous est proposé de fournir un travail. Travaillez-vous mieux en sachant que vous avez une responsabilité unique, ou lorsque vous vous dites que «de toute façon, d’autres personnes vont avoir à faire exactement la même chose» ?
C’est d’ailleurs une idée que l’on retrouve dans la chanson d’Alain Souchon «Foule sentimentale» ; le titre de ce morceau a ceci de saisissant qu’il juxtapose l’impersonnel et l’intime, ce qui nous rabaisse et ce qui nous sublime.
Par ailleurs, l’image de la foule évoque en partie des aspects négatifs, surtout depuis l’arrivée de la pandémie. Pour certaines personnes, elle est synonyme d’anxiété voire d’agoraphobie.
La foule est aussi le lieu où chacun se sent anonyme, pour le meilleur et pour le pire. C’est ainsi le lieu de prédilection des pickpockets et des «frotteurs». Le terme de crowdtesting pourrait-il favoriser des comportements déviants, dits de «passager clandestin» ou (pour continuer à utiliser des anglicismes) de «free-rider» ?
Un crowdtesteur pourrait être tenté de «frauder» en faisant semblant de tester et en remontant des résultats au pif (heureusement, Testeum comprend par design des mécanismes pour réduire à néant ces comportements). Les crowdtesteurs, réels ou potentiels, n’ont donc peut-être pas envie ni intérêt de s’identifier à cette foule. Or, cette population représente tout de même une des deux cibles principales de ce type de plateforme.
Que pourrait-on imaginer à la place ?